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Le
général Robert Close s'est éteint à l'âge de 81 ans.
Un livre-choc l’avait rendu célèbre en 1976.
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Ancien sénateur, il prit aussi à coeur la cause de Léopold III.
ÉVOCATION
En juillet 1996,
dans sa retraite montagnarde de Bosco Chiesanuova, entouré des mélèzes, des cèdres
et des sapins qu'il planta voici plus de quarante ans, le général Robert Close
concluait ses mémoires (l)
en notant qu’un jour prochain, ses amis pourraient dire, paraphrasant un mot célèbre:
«Il n'est pas là où il repose, mais dans le livre qu'il m'a laissé »...
Ce jour est arrivé.
Vaincu
par la maladie, "Bob" est décédé à l'âge de 81 ans. Ses funérailles
auront lieu jeudi en l'église St-Jacques-sur-Coudenberg, dernière étape d'un
chemin que jalonnèrent de multiples combats. Car l'homme ne faisait pas partie
du régiment des tièdes. « Aux
grands prêtres du conformisme et de la modération, écrivait-il, j'ai
une confession à faire: toute ma vie, j'ai été un intégriste de l'amitié,
un fondamentaliste de la liberté et un toxicomane de la vérité! »
C'est une thèse-choc
qui le fit connaître, en 1976, en Belgique et à l'étranger. Publiée sous le
titre « L'Europe sans défense ? », elle démontrait que l'infériorité
occidentale dans le domaine des forces conventionnelles, alors que le nucléaire
était neutralisé par la dissuasion mutuelle, créait une situation où les armées
de l'URSS et de ses alliés pourraient arriver « sur
le Rhin en quarante-huit
heures ». S'ensuivit un véritable tollé. Le ministre allemand Georg
Leber exigea que l'auteur soit relevé de ses fonctions du Collège de Rome pour
ne pas contaminer les officiers de la RFA avec ses « théories
erronées » selon lesquelles « toute
l'armée allemande ne servirait qu'à régler la circulation des troupes soviétiques »...
Mais l'officier persista et signa.
Hanté par la
guerre, Robert Close avait de quoi l'être. Né en 1922, il venait d'entrer à
l'École royale militaire quand le Reich déclencha son offensive foudroyante.
Prenant part à la campagne de 1940, prisonnier de guerre jusqu'en décembre, il
entra ensuite dans la résistance (réseau Luc-Marc) jusqu'à son arrestation
par la Gestapo, qui lui fit connaître trois camps de concentration successifs
de 1942 à 1945.
Un
témoin à charge
Poursuivant
sa carrière militaire après la Libération, il étudia les sciences économiques,
puis politiques et diplomatiques à l'ULB, fut commandant adjoint de l'Ecole de
guerre belge, maître de conférences à l'Université de Liège, commandant de
la 16e Division blindée en Allemagne…
Mais
il dut quitter prématurément la carrière militaire après avoir égratigné
Karel Van Miert, alors président du Parti socialiste flamand. A l'époque,
Armand De Decker, aujourd'hui président du Sénat, dénonça « ce qui, à mes yeux, apparaissait comme l'exécution d'un témoin à
charge, qui, en voulant mieux servir l'armée à laquelle il appartenait, avait
le courage d'en dénoncer les faiblesses ».
Le Démosthène
belge entra alors en politique et fut sénateur libéral de Brucelles, de 1981
à 1987, mais ce nouveau « Close-combat » se termina également par
une rupture, suivie d'un engagement au sein du mouvement unitariste Belgique-Europe-België,
resté marginal.
Dans les dernières
années de sa vie, il se consacra, toujours avec la même fougue, à la défense
de la mémoire de Léopold III. Devenu un familier d'Argenteuil, il bénéficia
d'un large accès aux archives du Roi et se fit son avocat dans un vibrant
ouvrage publié en 2001 (2).
Il nous confia récemment qu'il détenait des confidences enregistrées de la
princesse Lilian, avec laquelle ses relations furent parfois orageuses.
« Ma vie, disait-il, me paraît bien remplie et plutôt fertile en rebondissements imprévus ».
En effet...
PAUL
VAUTE
La
Libre Belgique du 8 décembre 2003
(1) Publiés sous le titre « Gauche! Droite! »
aux Editions Ligne Claire.
(2) « Léopold III. Les non-dits », même éditeur
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