Cercle Léopold III - La dernière escorte royale

LA DERNIÈRE ESCORTE ROYALE


Les escortes d'honneur sont des prestations aussi anciennes que l'institution militaire, mais c'est depuis l'instauration des armées permanentes que les modalités en furent codifiées. Pour 1a période contemporaine celles-ci furent explicitées dans 1e Décret Impérial du 24 messidor au XII, le Dictionnaire des Honneurs, Rangs et Préséances (1), 1e Règlement sur 1e service de garnison (A4), et l'actuelle Instruction sur le Cérémonial (IF 140).

Ces différents ouvrages précisent quelles autorités ont droit aux Escortes d'Honneur, leur composition, les limites territoriales de leur exécution, leur déroulement, 1e nombre de coups de canon à tirer et 1e Dictionnaire précité dans son édition de 1907 spécifie même comment éviter les encombrements et les interférences entre escortes aux abords de Sainte-Gudule à Bruxelles (2). II y est également prescrit que les escortes sont composées de troupes à pied ou à cheval selon que les personnages ou 1e Corps à escorter sont à pied ou en voiture. Dans les garnisons dépourvues de troupes montées ou dans lesquelles celles-ci ont des effectifs insuffisants, la gendarmerie peut être appelée à participer à ce service avec l'autorisation préalable du Ministre de 1a Défense nationale.

Depuis la motorisation de la cavalerie et 1a création de l'Escorte royale de la gendarmerie i1 y a 50 ans, celle-ci escorte 1e Roi et la Famille royale à cheval ou en moto tandis que 1a Police militaire motorisée escorte les Corps constitués. Ce n'est qu'en circonstances spéciales, par exemple en Allemagne, que 1a Police militaire escorte le Roi et 1a Reine lors de leurs visites aux Forces belges. En exécution de l'Ancien Règlement et tout comme les autres régiments, 1e 1er Lanciers a donc assumé diverses escortes royales à cheval dont 1a dernière se situe en 1935 à Liège lors de la Joyeuse Entrée du Roi Léopold III et de la Reine Astrid.

I1 est néanmoins intéressant de rappeler les circonstances dans lesquelles le 1er Lanciers a eu l'honneur d'assurer une Escorte royale exceptionnelle i1 y a 38 ans lors du retour du Roi Léopold III en Belgique.

Suite à 1a consultation populaire de mars 1950, le gouvernement avait prié 1e Roi de rentrer au pays et 1e Lieutenant-général Écuyer Robert JOORIS, Commandant la 1ère Circonscription militaire désigna le 1er Lanciers pour fournir l'Escorte réglementaire.

A ce moment, le Régiment achevait sa mutation de l'organisation reconnaissance en organisation sur Tanks Sherman mais il possédait encore des camionnettes blindées GMC dites "15 Blindés" et des Scout-cars Humber. Un détachement  fut donc formé sous les ordres du Chef de Corps, le Lieutenant-colonel Écuyer LINARD de GUERTECHIN. L'Étendard était porté par le Sous-lieutenant Guy SCHNORRENBERG escorté par les 1ers Maréchaux des logis-Chefs DELAHAUT et BERTIN et la troupe était commandée par le sous-lieutenant de 1e VINGNE (1er Lanciers) et le Sous-lieutenant LEYRE (élève officier).

La date précise du retour du Roi n'étant pas encore connue, le détachement rejoignit Bruxelles à la mi-juillet pour être prêt à toute éventualité et cantonna à 1a caserne ROLIN à ETTERBEEK.

Chaque jour, les véhicules étaient nettoyés, les tenues et équipements repassés, "blancotés" et "sidolés" mais les loisirs étaient occupés par des visites culturelles aux Musées d'Art et d'Histoire, au Musée de l'Armée du Cinquantenaire, au Musée Colonial de TERVUEREN et plus prosaïquement à la Brasserie VANDENHEUVEL.

Le 21 juillet, le retour du Roi fut annoncé pour le lendemain. Le 22 juillet à 6 heures. le détachement d'Escorte royale était rangé sur le tarmac de l'aérodrome militaire d'EVERE. Le Roi, les Princes Baudouin et Albert descendirent de deux Dakotas, furent reçus par les Autorités, passèrent en revue le détachement de la Force aérienne et prirent place dans les voitures de la Cour encadrées par le détachement du 1er Lanciers, précédé et suivi par des motocyclistes de 1a Police militaire. Le cortège prit le chemin de LAEKEN par les Boulevard Léopold III, WAHIS, LAMBERMONT et 1e pont van PRAET, le long desquels des détachements de toutes les armes rendaient les honneurs.
Au pont van PRAET un groupe mené par les sénateurs BLUME et MACHTENS (dont le fils présentait les armes avec le détachement de l'ETBL) poussa quelques cris hostiles. Arrivé au château de LAEKEN, le cortège fut salué par un détachement de l'École Royale militaire et l'Escorte stoppa de part et d'autre de l'avenue. Seul le Chef de Corps pénétra dans la propriété où il fut remercié par Sa Majesté. Mission accomplie.

C'est ainsi, que se déroula 1a dernière Escorte royale fournie par un Régiment de Cavalerie.

W. BRABANT
Lieutenant-colonel Hre BEM

D'après les souvenirs du Commandant e. r. Thierry de le VINGNE et de l'Adjudant-chef e. r. BERTIN


(1) VIATOUR, Capitaine à l'État-major des Places et DEGROOTE, Substitut de l'Auditeur militaire - Dictionnaire des Honneurs, Rangs et Préséances Edition GAND 1907.

(2) Cette prescription résulte probablement d'un incident survenu lors des funérailles du Président du Sénat au cours desquelles le Général Baron WAHIS, commandant les troupes, monta à cheval les marches de l'Eglise des Minimes pour interpeller le Procureur Général de la Cour de Cassation dont le retard avait causé du désordre dans le dispositif des troupes.

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